L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme (FIDH-OMCT) a publié le 7 mai 2020 une étude intitulée « Algérie : Zoom sur le Hirak », répertoriant les situations individuelles d’une vingtaine de défenseurs des droits humains harcelés par les autorités algériennes. Si les dirigeants du mouvement Hirak, qui continuent de réclamer pacifiquement l’avènement d’une Algérie démocratique, ont suspendu les manifestations depuis le 15 mars 2020 en raison de la pandémie de COVID-19, et que l’ensemble du pays a été placé sous confinement depuis le 4 avril, la répression a continué, avec des condamnations judiciaires à de la prison ferme.
S’il n’existe pas de chiffre officiel d’arrestations ou de détentions, le Comité national de libération des détenus (CNLD) estimait le 30 mars 2020 le nombre de « détenus du Hirak » à 1 200. Depuis le début du soulèvement populaire le 22 février 2019, les interpellations, arrestations, détentions arbitraires et mauvais traitements de militants pacifiques mais aussi de simples manifestants se sont multipliés.
Parmi les personnes ciblées, les défenseurs des droits humains – membres particulièrement actifs du mouvement – ont été de plus en plus réprimés. Leur harcèlement judiciaire s’est intensifié depuis septembre 2019, afin de les réduire au silence. La vague de libérations de manifestants et de figures du Hirak entre décembre 2019 et janvier 2020 n’aura été qu’un espoir de courte durée. La répression a repris en février, avec des manifestations violemment réprimées par la police, donnant lieu à des centaines d’interpellations de manifestants pacifiques, et une série de condamnations lourdes à compter du mois de mars.
Alors que le monde fait face à la pandémie du COVID-19 et à une crise sanitaire sans précédent, le Hirak a décrété une « trêve » à partir du 15 mars 2020, suspendant les marches pour des raisons sanitaires, afin de prioriser la lutte contre le virus.
En réponse, les autorités ont continué d’arrêter, harceler et condamner les défenseurs des droits humains qui avaient manifesté pacifiquement jusqu’au 15 mars 2020. Si plusieurs procès ou audiences ont été repoussés sine die, comme pour Ahcene Kadi, certains défenseurs ont été lourdement condamnés. Le 6 avril 2020, un tribunal d’Alger a condamné M. Abdelouahab Fersaoui, président du Rassemblement actions jeunesse (RAJ), à un an de prison pour « atteinte à l’intégrité du territoire national » et « incitation à la violence pour nuire à la défense nationale ». Ce dernier reste actuellement détenu et donc exposé à la contraction du COVID-19 en prison, tout comme Samir Belarbi, pour qui aucune date d’audience n’a pour l’heure été fixée.
D’une manière plus globale, si le gouvernement a annoncé début avril 2020 la libération de plus de 5 000 détenus, aucune de ces libérations n’a concerné des défenseurs des droits humains, qui restent donc à risque si une épidémie de coronavirus survenait dans des prisons algériennes bondées.