Par Mostafa Tossa
De tous les discours que le Roi Mohammed VI a prononcé ses dernières années, celui du 20 août 2015 a été le plus disert, le plus précis, le plus exigeant à l’égard des élus de la nation, notamment les élus locaux qui vont bientôt sortir des urnes des prochaines élections régionales. Sans doute le contexte national, l’évolution naturelle du modèle démocratique marocain y sont pour beaucoup dans ce diagnostic royal qui se veut sans concessions. Le but de toute cette séquence a été résumé par le Roi Mohammed VI : « Il s’agit, en l’occurrence, de la mise en œuvre de la régionalisation avancée. Notre vœu est de la voir s’ériger en véritable pilier du Maroc de l’unité nationale, de l’intégrité territoriale, de la solidarité inter-catégorielle, de la complémentarité et de l’équilibre interrégionaux. »
Cette nouvelle page politique marocaine qui s’écrit ne peut se faire dans le vide. Elle est si importante, si décisive dans le devenir actuel du Maroc que Le Roi Mohammed VI n’a pas hésité à utiliser des mots lourds de sens, qui frappent les esprits par la puissance de leur tonalité et la force de leur charge et qui dessinent la physionomie du projet politique en cours de construction. Le Roi le dit sans détours ni circonvolutions : « la révolution que nous entamons ne se fera que par des élus sincères ayant à cœur, avant toute chose, de servir leur pays et les citoyens qui leur ont accordé leurs suffrages. »
Après avoir insisté énormément à ce que les Marocains participent à ces élections et ne se laissent pas gagner par le désespoir, l’indifférence ou l’abstention : » Aux citoyens, Je dis ceci : le vote est un droit et un devoir national. C’est une lourde charge qu’il vous incombe d’assumer », le souverain s’est livré à une description minutieuse du portrait et des ambitions du nouvel élu marocain : » Il faut donc rappeler avec force que l’élu, au même titre que le médecin, l’avocat, l’instituteur, le fonctionnaire, et d’autres encore, se doit de travailler chaque jour. Il devrait même travailler plus qu’eux, car il est responsable des intérêts des gens, et n’exerce pas pour son propre compte ».
A ce titre, le Roi Mohammed se met au diapason avec l’opinion des marocains qui reprochent des défaillances à certains de leurs représentants ou qui se présentent comme tels : » Or il y a des élus qui s’imaginent que leur rôle se limite à se porter candidats et non à travailler. Et lorsqu’ils remportent les suffrages, ils s’éclipsent pour cinq ou six ans, et ne réapparaissent qu’à l’occasion du scrutin suivant. »
Dans son discours du 20 août, Le Roi Mohammed VI a appelé à une vraie moralisation de la vie publique qui commence par le choix de candidats destinés à servir le bien publique et hisser l’intérêt national au dessus de toute autre considération. Il a appelé les Marocains à faire le bon choix et mettre fin à d’anciennes et de vilaines pratiques qui, sinon minaient du moins affaiblissaient le processus démocratique marocain: » Le vote ne devrait pas favoriser le candidat qui parle beaucoup, et élève la voix plus que les autres, en brandissant des slogans creux, pas plus qu’il ne devrait profiter à celui qui distribue quelques dirhams au cours des campagnes électorales et vend des promesses mensongères aux citoyens. »
Par ailleurs le message royal aux partis politiques est des plus limpides pour qu’ils prennent en considération l’importance des enjeux que le Maroc est en train de vivre et qui leur imposent de revoir certaines pratiques dans leurs manières de faire de la politique. Le Roi les met devant leur responsabilités: « Je dis donc aux partis et aux candidats: les élections ne devraient pas avoir pour objectif d’obtenir des postes, mais elles devraient être dédiées au seul service du citoyen. »
Pour le Maroc l’enjeu de cette régionalisation est de taille. La réussir avec des structures efficaces, solides et crédibles, et des hommes et de femmes exclusivement dédiés au service de l’intérêt national participe à parachever l’unité nationale et à l’assoir sur de solides fondations. La régionalisation avancée voulue par le Roi Mohammed VI va offrir des pouvoirs élargis aux structures de ce qui peut facilement s’apparenter à des gouvernements régionaux qui auront un rôle décisif dans le développement local et le renforcement de la solidarité nationale. D’où la vitale importance accordée par le souverain au casting de ces hommes et femmes qui seront aux responsabilités demain dans les multiples régions du royaume.