Par Jean-Paul Brighelli
Les discours du Roi du Maroc, ça ne fait plus de doute, ont changé de nature. Ceux du 30 juillet et du 20 août avaient déjà donné le « la », et le dernier, celui de La Marche verte, a confirmé la tendance. Cela fait quelques années que le discours du 6 novembre adopte un ton volontaire, résolu, et celui prononcé cette année s’est inscrit aussi dans une approche de la même nature, arguments et questionnements inclus.
Si l’on devait schématiser ce discours, on pourrait dire que le roi a abordé la question de la manière suivante : 1/ Voilà ce que je réponds aux adversaires de l’intégrité territoriale, et spécialement l’Algérie, 2/ Voici notre vision sur le traitement économique des zones sud, frontalières avec l’Afrique et, 3/ Ainsi sont nos relations avec notre continent, historiques et culturelles.
Mohammed VI commence par récuser la manière adoptée par certains organismes qui se contentent d’entériner « des rapports établis à l’avance, (prenant) prétexte de certains agissements isolés pour essayer de porter atteinte à son image (du Maroc) ». Argumentaire par la méthode interrogative : « Est-il raisonnable de penser que le Maroc respecte les droits de l’Homme dans le nord du pays et les transgresse dans le sud ? ». Le même reproche est adressé à certains Etats qui ignorent les réalisations accomplies par le Maroc et, là encore, la question directe : « Y a-t-il une crise de confiance entre le Maroc et certains centres de décision chez ses partenaires stratégiques, concernant la question des droits de l’Homme dans nos provinces du sud ? ». La réponse est claire, et apparemment positive… et Mohammed VI le dit de manière allusive : « Le fait même de poser cette interrogation indique qu’il y a quelque chose d’anormal en l’espèce« . En effet, « les adversaires tentent d’acheter les voix et les prises de position de certaines organisations hostiles à notre pays », et ça, c’est anormal !
Puis, le roi va droit au but, en critiquant directement l’Algérie, à deux reprises : « (les adversaires) dilapident de la sorte les richesses et les ressources d’un peuple frère, que cette question ne concerne pas, mais se dresse plutôt comme une entrave à l’intégration maghrébine ». Et pour ceux qui n’auraient pas compris, Mohammed VI se fait plus précis : « Le Maroc refuse de recevoir des leçons en la matière, surtout de la part de ceux qui bafouent systématiquement les droits de l’Homme. Quiconque souhaite surenchérir sur le Maroc n’a qu’à descendre à Tindouf, et observer dans nombre de régions alentour, les atteintes portées aux droits humains les plus élémentaires ».
Passage intéressant, celui où il est dressé un parallèle entre les deux peuples marocain et algérien ; ainsi, le premier « se distingue par son unanimité inébranlable autour de son intégrité territoriale, pour laquelle il est mobilisé collectivement et disposé à consentir tous les sacrifices », et pour le second, ses dirigeants « dilapident de la sorte les richesses et les ressources d’un peuple frère, que cette question ne concerne pas ».
Les deux autres parties sont plus conventionnelles, bien que prononcées sur un ton didactique, argumenté, expliquant et détaillant les différentes avancées économiques au Sahara, insistant sur l’inexactitude des « allégations des adversaires du Maroc sur une prétendue exploitation des richesses du Sahara, une partie importante des ressources et des richesses des régions centrales et septentrionales du Maroc, (étant) dédiée à la satisfaction des besoins de Nos citoyens du Sud« . Le roi apporte ensuite des éclairages sur la politique, pensée et concertée, menée et à mener au Sahara : mégaprojets d’investissements propres, dynamique de développement durable, faire des provinces sud un espace de développement intégré…
Enfin, Mohammed VI est revenu sur le prolongement naturel du Maroc, qui se trouve en Afrique, et est revenu sur les relations historiques du pays avec son voisinage du sud, mentionnant ses récentes – et nombreuses – visites sur le Continent Noir et mettant l’expérience acquise par le Maroc dans maints domaines à la disposition des Africains, avant d’expliquer la nouvelle politique du Maroc en matière de migrations, précisant que le Maroc, « jadis point de passage vers l’Europe, notre pays s’est transformé en destination de résidence« .
Un discours en forme de mise au point, dans lequel le Maroc se dit prêt à faire ce qu’il faut, mais aussi disposé à ferrailler contre ceux qui s’inscrivent en porte-à-faux.
Lire le texte intégral du discours royal du 6 novembre 2013.
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Source : http://www.panoramaroc.ma